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Une faible rémunération accordée par les maisons d’édition ?

En 2014, suite au projet d’augmentation de la cotisation de la retraite complémentaire, l’association Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse dénonce la sous-rémunération des auteurs sur des marque-pages et dans une pétition. Les maisons d’édition sont l’une des institutions mises en cause, néanmoins la posture des grandes maisons d’édition est très différente de celle des maisons d’édition indépendantes, également loin d’avoir une situation financière stable.

Interview de Thierry Groensteen, théoricien de la bande dessinée - La rémunération des auteurs, une conséquence de la chaîne du livre
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Rémunérés à deux reprises par les maisons d’édition - lors de la création de la BD (en avances de droits), et après sa publication (en droits d'auteurs) - les auteurs estiment que leurs revenus sont leur principale cause de frustration. Selon l'EGBD, grâce aux droits d’auteurs, ils reçoivent entre 8 et 12% des ventes de leurs BD (en moyenne 8%) à partager entre scénaristes, dessinateurs et coloristes, alors que les maisons d’édition perçoivent 21% de ces mêmes droits d'auteur. Depuis les années 2000, les auteurs ont également vu leur rémunération baisser lorsque les maisons d’édition ont décidé de payer les auteurs au livre, et non plus à la page, lors de la création des bandes dessinées.

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Des 1200 maisons éditions recensées dans le supplément Livres Hebdo en France, les trois grands groupes Delcourt, Glénat et Média-Participations (Dargaud, Dupuis, Fleurus, Le Lombard, Kana, Éditions Blake et Mortimer, Urban Comics et Lucky Comics) totalisent depuis quelques années, selon Thierry Groensteen, “de 35% à 40% de l’offre éditoriale totale”. Egalement, 12 maisons d’éditions représentaient, en 2005, trois quarts du chiffre d’affaires. Les grandes maisons d’édition sont ainsi l’une des rares entreprises à générer un chiffre d’affaires convenable. A chaque période de parution, elles misent ainsi sur une bande dessinée en particulier. Si celle-ci devient un “bestseller”, ces grandes maisons d’édition peuvent redistribuer, aux autres auteurs, les revenus générés grâce aux ventes de cette BD.

Oriane Lassus, l’auteur des bandes dessinées Le Meilleurissime Repaire de la Terre et Quoi de plus normal qu'infliger la vie ? dénonce cependant le fait que, malgré cela, la rémunération des auteurs reste tout de même faible : “Les droits d’auteurs et les avances sur droits devraient être plus élevés. Il y a des maisons qui paient 10%, d’autres 6% de droits d’auteurs divisés entre les dessinateurs et les auteurs, mais certaines grosses maisons d’édition pourraient rémunérer plus, que ce soit en droits d’auteur ou en avances de droits, car elles en ont les moyens, mais elles ne le font pas”.

Malgré les revendications des auteurs, le chercheur Thierry Groensteen indique que les maisons d’éditions peuvent difficilement rémunérer davantage : “L’éditeur est celui qui doit payer l’imprimeur, le distributeur, la publicité, le marketing. Ces institutions ont un certain coût. De plus, en publiant des livres, l’éditeur prend un risque. S’il n’arrive pas à vendre, il peut perdre l'argent qu’il a investi et avoir des difficultés pour l'édition des prochaines bandes dessinées. Il doit donc faire en sorte de dégager une marge qui lui permettra d’investir dans d’autres livres.”

Marque-pages créés par l'association Charte des auteurs et illustrateur jeunesse

Au contraire des grands groupes, les maisons d'édition indépendantes, connues pour ne pas appartenir à de grandes maisons d’éditions, connaissent parfois des difficultés financières, qui les obligent à être beaucoup plus prudentes dans la gestion des bandes dessinées qu’elles publient. La situation de la maison d'édition Tanibis en est la preuve.

Fondée en 2000, Tanibis est une maison d’édition créée par trois auteurs (Samuel Petit, Claude Amauger et Aurélien Maury) dans le but de publier des bandes dessinées alternatives qui méritent de faire partie du paysage culturel. Leur objectif principal n’est pas de faire que la maison d’édition leur soit personnellement rentable, raison pour laquelle Tanibis a le statut d’association à but non lucratif. Les personnes qui travaillent pour la maison d’édition sont ainsi bénévoles ou freelance, puisque les revenus générés par les publications de BD sont conservés pour publier de nouvelles bandes dessinées.

 

Sensibles à la rémunération des auteurs, les membres de la maison d’édition indiquent, malgré les difficultés que peuvent avoir les maisons d’éditions indépendantes, prévoir dans les prochains mois de passer de 8% à 10% de droits d’auteurs. Claude Amauger, l’un des fondateurs de Tanibis, nous explique plus en détails la situation financière de sa maison d’édition, des maisons d’éditions indépendantes en général, et les raisons qui légitiment le choix de ce statut d’association.

© 2019 par Johanna Bonenfant

Toutes les images de fond ont été prises par mes soins. Je remercie donc les librairies lyonnais La bande dessinée, Expérience, La bourse et 9ème bulle de m’avoir laissé photographier leurs décors. Je remercie également ceux qui ont participé à mon reportage : Oriane Lassus, François Gadant, Florian Bovagnet, Henri Lemahieu, David Servenay, Claude Amauger, Fabien Wiatr, mon tuteur Laurent Burlet et mon entourage.

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